... Dans la peinture spontanée, entre
l'artiste et le plan de la représentation, il n'existe
que des barrières psychologiques. L'oeuvre naît
durant le processus même de son élaboration. Il
n'y a ni sujet ni objet, le peintre dirige son pinceau à
moins que ce ne soit le pinceau qui le mène ou bien la
forme ou la couleur qui dicte le déroulement des opérations;
c'est un processus, un acte où il est impossible de séparer
les éléments qui le composent sans le détruire.
...C'est une danse improvisée, fixée
sur le papier ou la toile à l'aide de la couleur. Evidemment
une telle méthode suppose une subjectivité particulière.
L'artiste doit s'autolibérer, se détacher du monde,
de sa vanité et de ses passions pour pouvoir pleinement
incarner son "Moi" d'artiste, se dissoudre dans son
objet, se fondre avec le processus d'élaboration de son
oeuvre. L'artiste et son oeuvre sont indissolublement liés.
...La présence métaphysique apparaît
dans ses productions comme la pulsation de la matière,
comme des radiations énergétiques baignant dans
des nuances de couleurs différentes et qui se nichent
en des formes visibles, les modifiant, les transformant jusqu'à
les rendre méconnaissables, à travers des contours
flous, des formes colorées qui se bousculent ; la tension
qui en émane crée le détonateur énergétique
de l'oeuvre et son aura inimitable.
...La photographie spontanée suppose
d'être libérée du déterminisme technologique,
et la peinture spontanée du conservatisme psychologique.
Dans l'un et l'autre cas cependant, le résultat en est
une autre réalité transfigurée. Il est
vrai qu'une zone d'ombre demeure : qui au bout du compte en
est l'auteur, l'artiste qui "ne sait pas ce qu'il crée",
ou la divine providence?